Semaine Européenne de Vaccination : la parole à Aviane Auguste

Merci pour cette invitation. Je m’appelle Aviane AUGUSTE, j’ai 30 ans et je suis chercheur en Epidémiologie. Je travaille actuellement à l’Institut Gustave ROUSSY au sein de l’équipe « Exposome et Hérédité » au CESP ( Centre de Recherche en épidémiologie et santé des populations ).

 

Le Comité 35 a financé votre projet de Recherche en 2019 intitulé « Epidémiologie des cancers des voies aéro-digestives supérieures aux Antilles françaises : facteurs de risques comportementaux, viraux et environnementaux » Pouvez-vous nous en dire plus ?

 

Tout d’abord, je tiens à remercier la Ligue pour son soutien. J’ai réalisé une thèse de doctorat pour investiguer pour la première fois sur les déterminants des cancers survenant dans les voies aéro-digestives supérieures, également appelées cancers de la bouche et de la gorge. L’incidence de ces cancers est particulièrement élevée aux Antilles Françaises par rapport à d’autres îles de la Caraïbe, et presqu’au même niveau que la France hexagonale. Le papillomavirus humain, encore appelé l’HPV, était soupçonné de contribuer à cette forte incidence aux Antilles Françaises. Ma thèse a confirmé que l’HPV augmentait le risque de cancers de la bouche et la gorge. Par ailleurs, j’ai mis en évidence différents types d’HPV dont la distribution est spécifique aux Antilles Françaises. En effet, aux Antilles Françaises, parmi les types d’HPV catégorisés « à haut risque oncogène », HPV16 et HPV18 sont loin d’être les majoritaires chez ces cancers comparés à la France hexagonale. Les types d’HPV circulant aux Antilles Françaises nécessitent une réponse de santé publique adaptée au territoire.

 

Nous sommes actuellement en pleine Semaine européenne de la vaccination, semaine dédiée à la promotion de la vaccination. Forcément cela fait écho à vos travaux ?

 

En effet, aujourd’hui la vaccination est un outil important pour lutter contre certains cancers notamment, le cancer du col de l’utérus et le cancer de la gorge.

 

Quels moyens (techniques…) avez-vous utilisé pour développer vos études ?

 

Nous avons enquêté sur 150 cas de cancers et 500 personnes dans la population générale. Ensuite nous avons comparé la fréquence d’exposition à différents facteurs chez les personnes atteintes d’un cancer et dans la population Antillaise. Nous avons prélevé des échantillons salivaires chez des sujets puis nous avons réalisé des essais biologiques au sein du CHU de Guadeloupe (Karubiotec™) pour détecter les différents types d’HPV. Des modélisations statistiques nous ont permis de comparer nos deux populations en prenant en compte les facteurs de confusion essentiels.

 

Quelles sont les conclusions que vous avez pu mettre en évidence ?

 

Au vu des études épidémiologiques faites aux Antilles Françaises, nous devons privilégier les vaccins nonavalents qui incluent les types d’HPV les plus prévalents aux Antilles Françaises. Les études réalisées dans cette population démontrent qu’on peut tirer un bénéfice considérable du vaccin. L’HPV était attribuable à 15% de cas de cancers de la gorge et de la bouche.

 

Avez-vous des perspectives d’évolution sur le sujet ?

 

A l’avenir nous voudrions analyser l’HPV dans les tumeurs des patients atteints de cancer de la gorge et de la bouche aux Antilles françaises. En effet, c’est une étape cruciale pour approfondir mes études.

 

A l’avenir, avez-vous de nouveaux projets d’études autour de la vaccination ?

 

Je travaille actuellement sur un livre qui reprend de manière exhaustive toutes les preuves scientifiques qui démontrent les spécificités de l’épidémiologie du cancer de la gorge et de la bouche chez les populations de descendance Africaine. La vaccination anti-HPV fait partie des chapitres abordés dans ce livre.